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Ferlov Mancoba

1995-07-20

Dokumentindhold

Ernest (og Wonga) skriver til Fleurant-familien om deres rejse til Sydafrika fra oktober 1994 til januar 1995. For Ernest er det hans første rejse siden han forlod sit fødeland i 1938; for Wonga er det hans første rejse til Sydafrika. Brevet er bemærkelsesværdigt ikke kun for detaljerne i deres oplevelse, men også for åbenheden i deres følelser. Brevet er på fransk.
Maskinoversat tekst

Transskription

(transcription by W. Sze]
[sender: Ernest Mancoba, from 153 Rue du Chateau, Paris]
[addressed to: Gael, Iris and Tobie Fleurant
[date: 20 July 95]

Cher Gael,cher Iris,cher Tobie, 

Voici enfin trouvé le moment d'un peu de calme pour vous adresser ce petit mot,aprês l'ouragan,le tremblement de terre, le ras de marée d'emotions qu'a été pour moi,Ernest,le retour,et pour moi,Marc le premier voyage en Afrique du Sud,puis le second. 

C'est avec un espoir,et une excitation mêlée d'inquiétude et d'une certaine angoisse que nous avons pris l'avion pour un long voyage de 12 heures.Départ de Copenhague,avec correspondence à Lon-dres.Je n'oublierai jamais ma première vision de l'Afrique ,par le nublo. Comme nous étions partis de Landres assez tard,vers 21 h. ,le début du voya  ge s'est passé dans l'obscurité totale,à part les grandes villes,jetant leurs feux comme des constellations éloignées.Endormi audessus du Sahara, je me suis réveillé vers la fin de la nuit ,le jour n'étant pas encore levé.C'est alors que j'eus ma première image du continant,si souvent rêvé, de mes ancêtres:celle des béances flamboyantes de volcans inconnus de moi ou était-ce dévorants  feux de brousse,dans une nuit noire traversée par des éclairs intermittents fouettant une terre encore indiscernable, mais qui donnait l'impression d'une gigantesque puissance alanguie sous le manteau des ténèbres. Puis l'Est a rougi et après le dévoilement de l'aube,l'Afrique m'est apparue dans la verte  splendeur· de ses forêts et le fauve dépouillement de ses savanes.Teintes qui peu à peu,à mesure qu'on approchait du but,cédaient la place à la couleur rouge de la terre nue des déserts du nord de l'Azanie.Puis la richesse du paysage ,lors de la descente amorcée vers des sols plus généreux,déroula avec davantage de minutie sous l'aile qui nous portait,les beautés d'une nature tantôt sauvage tantôt domestiquée.

L'atterrissage à l’aéroport Ian Smuts de Johannesburg fut un moment inoubliable pour nous.Le personnel de la Compagnie qui nous avait spécialement gaté sur recommendation de l'ambassadeur au Danemark,nous salua ,avec prévenance .Les premiers pas d'Ernest sur le sol natal après quasiment une vie d'absence,furent très émouvants.J'ai essayé de les fixer au moyen de la photographie mais ce que nous av0ns ressenti fait partie des choses qui ne s'incrivent pas sur une pellicule de celluloide.

Mais l’émotion atteignit son paroxysme à la sortie des passagers,lorsque nous fûmes accueillis par la houle de nos amis et la famille.Les deux soeurs d’Ernest étaient là,ainsi que cousins cousines nieces.Joie.Rires.Larmes.L'enfant prodigue était rentré a la maison,après 56 longues années,et quelques semaines après que l'Apartheid se fut écroulé sous le trépignement pacifique et fraternel d'une foule multicolore d'électeurs novices.C'est ce qui nous a d'abord frappé,cette gentillesse du peuple.Dès l'aéroport ,tandis que nous nous embrassions avec notre famille et nos amis,attirée par ce remue-ménage,une petite foule d'africains ordinaires,simples travailleurs de l'aéroport,en bleu de travai femmes de ménage,bagagistes etc ... se sont approchés,nous ont salués et demandé si nous étions des compagnons de Mandela.NOus leur avons répondu que non, que nous étions des artistes' retour d’exil. ILs étaient heureux pour nous et partageaient notre bonheur.

De l'aéroport  nous sommes allé directement à la Johannesburg Art Gallery.C'est le musée d'art plastique de la ville, très beau,et bien organisé,mais qui avait la particularité de n'avoir contenu jusqu'à ces toutes dernières années d'oeuvres d'artiste noir.Le premier à y avoir été accepté ayant été notre ami Gerard Sekoto, réfugié à Paris depuis avoir 1947 et malheureusement décédé notre a quelques mois de la libération de Mandela,et avant d'avoir pu fouler à nouveau sa terre natale. 

L'inauguration de l'expo fut à ne pas croire.Elle eut lieu devant 400 personnes ,reunies dans le Grand Hall du musée,pour entendre les discours de Madame le Conservateur,de Govan Mbeki le vieil ami d'Ernest, aujourd'hui vice president du Sénat,dont le fils est le Premier Ministre et successeur probable du Président actuel,et enfin celui d'Ernest qui prit la parole,debout,pendant vingt minutes sans notes,dans une ambiance extraodinaire,après avoir reçu estra les éloges d'un Ibongi ,sorte de poète-mage traditionnel qui arpenta l’estrade en agitant son baton pour rythmer son propos Ernest eu fini son adresse,l’émoi était tangible.Madame le vice-maire de Johannesburg n'y tenant plus,se précipita au micro,pour dire son sentiment, et souhaiter la bienvenue à ce natif de la ville enfin rentré au bercail. 

Les quinze jours qui suivirent furent consacrées aux interviews pour les télévisions et les journaux. 

Mais le plus important pour nous ce furent les visites à la famille surtout chez ma cousine Muriel à Soweto,où elle est institutrice.Ma tante Edith y vit avec elle et ses petits-enfants.Soweto est une immense banlieue où l'ancien régime de la Discrimination ,concentrait le prolétariat noir, Trois millions d'hommes s'y entassent sur une surface très étendue bien plus grande que Paris intra-muros.Muriel a vécu tousles evènements,dont la révolte des enfants,qui représenta le début de la fin pour l'apartheid, au premier rang,puisqu'il s'agissait en partie de ses élèves.La"SOuthWEstern TOwnship",c'est sur un espace à perte de vue ,des amas infinis de maisonettes qui vont de ce qui n'a pas de nom à la maison en dur,en passant par la cabane en tôle ondulée.Avec depuis quelques temps quelques villas très luxueuses appartenant à des noirs très riches,mais dont la couleur de peau leur interdisait d'habiter les zones blanches,bien qu'ils en eussent largement les moyens .

NOus eumes un merveilleux accueil à Soweto.

Quelques semaines plus tard,le mariage de ma nièce Penny m'a donné une idée de la solidarité,de la cohésion et de la convivialité du peuple noir.Les festivités s'étendirent sur 3 jours.Je ne connais pas le fond du mystère économique qui a rendu ce faste possible.Le premier jour marque traditionnellement la réception du jeune homme dans la famille de sa future épouse.Je me suis joint aux hommes qui passaient ce jour là des heures accroupis à consommer de la bière rituelle africainequ'on verse d'une calebasse et qu'on boit d'un même  grand bol de terre cuite aux magni-fiques peintures ndebelé,géométriques,grises,noires et blanches.Ils parlaient des affaires de la famille et de la tribu tandis que les femmes préparaient des ustensiles de cuisine.Soudain voici l'arrivée de l'animal du sacrifice.C'est un boeuf qu'il revient aux hommes de tuer ,après que les femmes en agitant des tissus blancs,eurent chassé les mauvais esprits. Le sang qui coule dans la terre doit nourrir les dieux souterrains,et les seurs ;et les hommes après l’avoir abattue,doivent dépouiller la bête et al découper,certains morceaux étant réservés aux hommes ,certains aux femmes. Pour ma part la volonté d’appartenance et la peru de n’en être pas digne me fait manger malgré mon estomac scandalisé le morceau de foie,encore chaud et pantlelant qu’on me tendit.

Toutes les femmes sont occupées à cuisiner pour Je lendemain.Jour du mariage à l'église.La cérémonie a lieu dans la cathédrale de Hillbrow. Les mariés sont en effet de confession catholique -mais pour les africains les différences entre les églises venues d'Occident se réclamer du Christ, ne sont pas capitales.Généralement la femme adopte,ainsi que les enfants la confession du mari.C'est ainsi que ma cousineélevée dans la religion presbytérienne par ma tante,est entrée et a élevé ses enfants dans la religion d'un mari,catholique.Il faut dire que c'est là un casse-tête difficile à comprendre sous ces latitudes mais qui n'embarrasse guère la vie de l'africain.En tout cas,la ferveur est immense.De ma vie je n'ai senti un tel soufflle de foi,orthodoxe ou non,dans un lieu de culte. Les choeurs étaient magnifiques,profonds,plus émouvants même ,je trouve , que ceux des églises noires américaines,pourtant si dynamiques.Les hymnes repris par toute l'assistance,dont beaucoup étaient en larmes,et qui se leva soudain comme un seul homme ;fit trembler la cathédrale quasi pleine  laquelle se mit à vibrer et chose que je n'avait jamais vue,les mariés et la foule sortirent non pas en marchent ,mais ,véritablement en chantant et en dansant sur un rythme"endiablé'",si on osait ce mot en la circonstance .C 'est une impression extraordinaire que de se sentir porté par le rythme vivifiant d'une spiritualité naturelle,dépourvue d'arrière-pensées,ignorant superbement le dogmatisme et le fanatisme ,qui au cours de l'Histoire ont si souvent marqué ce qu'on pourrait appeler l'irréligion religieuse avec ses intérêts inavoués d'autant plus sordides lorsque ce derrière quoi ils s'avancent et qu'ils instrumentalisent,pour ansi dire;c'est le pur visage du Christ. 

Après,sur des tables dressées dans les deux rues de Soweto , bordant la maison de Muriel,des centaines de convives ont banqueté des heures durant·Puis les mariés sont passés dans les rues du quartier,accompagnés d'un orchestre improvisé,saluant sur le pas de leur porte les habitants qui avaient connu Penny  toute petite.

En soirée,l'évènement prit un tour plus mondain,le marié apparrenant à une grande famille dont un des membres est gouverneur de la province de l'Orange Free State,jadis bastion de l'Apartheid,et un des successeurs possibles de Mandela.Une reception avec diner et bal fut donnée dans un grand hotel chic d’un quartier"rupin"c’est à dire blanc. Allergiques au smoking hotel et au noeud papillon,nous avons réussi à y échapper.

Le troisième jour fut consacré à l’accueil de la mariée  dans la famille du jeune homme ,d'origine swazi.De nombreux rituels marquèrent l'écènement,mais furent rendus quelque peu pénible par le port sous la canicule estivale,des couvertures traditionnelles swazi.

Les festivités prirent fin après un déjeuner champêtre et dansant dans un établissement de campagne.Nous ne pûmes tenir jusqu'au bout et nous rentrâmes chez nous dans la petite maison mise à notre disposition au fond de leur jardin,dans dans la banlieue blanche de Johannesburg ,à Melville par un couple de très gentils afrikaners,Gerrit et Lenny.Nous y sommes demeurés plusieurs mois.Et avons même pu y travailler.Avant de partir pour le Cap,quelques semaines.

Rentrés à  Johannesbourg,revoir notre famille,nous sommes allés à la recherche de la tombe du père et de la mère d'Ernest,Irvine et Florence, pour nous y recueillir. Les cimetieres africains d'Afrique du Sud n'ont rien à voir avec ceux que nous connaissons:la pauvreté des gens et la négligence des autorités font qu'ils ressemblent plutôt à des terrains vagues,sans cloture ni personnel veillant à l’entretien.D’autre, part, le dénuement des familles ne leur permet que rarement l'achat de pierres tombales.Ce qui fait que les pauvres planches de mauvais bois clouées ensemble en guise de croix et autres signes dérisoires élevées par le souci des familles sont rapidement réduits à néant,nous faisant marcher sans le savoir sur les sépultures dont toute trace est bientôt effacée.

Trois heures durant ,sous un soleil de plomb ,nous avons cherché sans succès.Lorsque les plus vieux d'cntre nous,Ernest et sa soeur Edith,qui avaient assisté en son temps à l'inhumation et ne reconnaissaient pas l'endroit,une vaste étendue bordée par un bidonville,eurent interrogé des passants,nous comprimes que ce lieu n'était pas l'endroit que nous cherchions.En effet nous avions aussi remarqué que les tombes dataient butes d'une époque postérieure à 1946. On nous dit que l'ancien cimetière se trouvait à quelques kilométres de là.Lorsque noes y arrivâmes,il ne nous fallu pas plus de quelques minutes,en ce lieu bien plus petit,entouré aujourd'hui d'usines empanachée de fumées,pour trouver enfin les lieux de sépultures de mes grands parents;car un de mes oncles ,médecin,avait acheté de grosses pierres tombales,en forme de tronc d'arbre,sur lesquels, les noms étaient gravés très lisiblement.Et Ernest put enfin accomplir ce qui est la priorité pour tout exilé rentrant au pays,rendre hommage à ses morts. 

Le lendemain nous primes l'avion du retour pour Paris. 

Mais quelques mois après s'ouvrait l'exposition du Cap.Là aussi l'inauguration eut lieu devant 300 personnes,avec discours officiels dont celui du directeur de cabinet de la présidence,conseiller de Mandela un cape-coloured,et la présence du vice président de l'Assemblée Nationale, un indien,et celle de l'ambassadeur de France,une dame très gentille. 

Alors qu'à ''Johannesburg l'exposition se développait sur 3 salle successives,au Cap,dans un très beau batiment de style colonial,toutes les oeuvres étaient rassemblées dans une très grande salle avec piliers au milieu.

[sketches (left): plan of the exhibition at Johannesburg Art Gallery; (right): plan of the exhibition at the South African National Gallery (Cape Town)]

Ce séjour fut l'occasion pour nous de prendre contact avec la communauté des "coloureds".Qui comprend tous ceux qui n'étaient classifiés dans le régime précédent ni comme noirs ni comme blancs.Les métis,les Indiens, Malais,Chinois et autres ... Longtemp  les dirigeants blancs avaient cru que les avantages qu'ils avaient accordé à cette commnnauté par rapport aux noirs la rendrait solidaire de l'apartheid.Mais peu à peu elle aussi s'est dressée contre ce système honni.Et l'Université de Western Cape qui a conféré à Ernest le titre de docteur '' honoris causa '', fut un des fers de lance de l.'opposition.Cette université était réservée aux coloureds mais depuis peu elle est ouverte·à tous.Le fait de conférer cet honneur à un noir était aussi quelque chose de tres symbolique pour elle.Ernest dans son discours d'acceptation insista aussi sur cette dimension,rappelant la vie de notre famille dans son expression et dans son existence même au traverds des tragédies de notre temps.Elle est née de l'union au plus profond des ténèbres,de deux êtres qui selon les aprioris idéologiques avoués ou inavoués de l'Occident  eussent dû représenter des contraires inconciliables,proclamant au contraire l'intégrité fondamentale de l'espèce humaine.C’est aussi le sens profond de ce qu'on appelle Art et auquel nous avons consacré notre existence. 

Un moment inoubliable fut celui des retrouvailles avec Jane Gool l'amie et la camarade, l'indomptable combattante révolutionnaire . Issue d'une famille malaise,dont la commnnauté fut importée par les hollandais voici trois siècles comme esclaves,depuis la lointaine Java,pour fait de résistance,déjà!son père avait été un des premiers représentant de couleur à siéger dans le conseil municipal du Cap.Et des rues de la ville portent aujourd'hui son nom.Elle et son frère furent initiés au marxisme par des réfugiés allemands etsurtout à une époque extraordianairement précoce à la réaiité de sa perversion nationaliste et bureaucratique,le stalinisme. 

C'est ainsi que moi Ernest grace à un ami d'université dont celle devint plus tard la compagne,suis entré en contact auec cette famille, malaise de civilisation musulmane,dans laquelle je fus toujours accuelli à bras ouverts.La dernière personne dont mes yeux conservaient le souvenir dans mon exil,ce fut le frère Goolam qui m'avait accompagné et aidé a porter mes bagages jusqu'au bateau ,le"Balmoral Castle" qui devait m'emporter vers l'Europe et mon destin.Sa silouette fut la dernière que je pu distinguer avant que disparaissent au loin les côtes de ma patrie. 

Et n'est-il pas étrange que la premiere personne que je rencontre, moi,Marc,en prenant le train pour Capetown ,depuis le petit village de pêcheur dans la banlieue de la ville,et qui m'adresse la parole dansle compartiment ,m'ayant reconnu je ne sais comment,peut être sur une photo de journal,soit précisément un ami de ce mê:e Goolam et de Jane?Tu peux t'imaginer ma surprise et mon incrédulité,lorsque par la fenetre du wagon, il me dit: "D'ailleurs voici l'immeuble où Goolam avait son cabinet médical".  Bouleversé je l'ai malheureusement laissé descendre sans prendre le temps de lui demander son adresse.Cette rencontre inaxplicable demeure pour moi miraculeuse et fantomatique.Mais je n'étais  pas au bout de mes surprises.

Lors d’un diner chez notre ami Govan Mbeki,une femme d’origine malaise s'offrit à nous faire visiter le quartier malais le lendemain. Son nom Zobeida.Elle avait l'air d'une innocente jeune fille .Quelle ne fut dès lors notre étonnement quand nous apprimes plus tard qu'elle avait été la personne la plus recherchée par la police de Botha dans la région du Cap; sous l'ancien régime.Comme nous cherchions un lieu pour nous restaurer elle nous dit qu'elle connait un endoit;la maison de son amie d'enfance, dont les parents avaient reconverti quelques chambres en restaurant. Npus montons done jusqu'en haut d'une colline dominant toute la baie du Cap avec la montagne de la Table en face,une des plus belle vue qui se puisse admirer au monde.Nous sommes accuelli et servi comme des rois.Le chef defamille qui à l'appe;l du muezzin était descendu à midi s'incliner devant Dieu,était remonté pour partager notre repas et nous canter l'histoire de sa communauté.Voici 3 siècles ils étaient l'élite du peuple de Java ceux qui s'étaient dressé contre l'envahisseur et avaient subi pour la peine l'exil et l'esclavage.Ils avaient été a l'avant garde de la lutte anti-apartheid,toutes la famille y avai± participé dont les trois filles belles et dignes qui vinrent nous saluer.Ce fut une grande révélation aussi pour nous de rencontrer l'Islam à travers ces gens ,sous une forme que nous ne connaissions pas ,à la fois douce et forte,ignorant totalement le fanatisme si terrible parfois ailleurs et si proche de ce que nous avons connu en Occident audhautres époques.Je ne sais si c'est l'influence des Sufis,dont on ne sais comment elle s'est insinuée ·jusqu'ici,mais j'ai vu là l'esprit religieux dans ce qu'il a de plus convainquant,dans la mesure il aide lez gens àse tenir debout à tout prix mais sans écraser l’autre, au contraire en participant,par le travail ou l'expression spirituelle à l'harmonie du monde.Pour eux,toute activité humaine,jusqu'à l'art ou la politique devient une façon d'adorer l'Esprit Universel,Dieu. 

Nous sommes descendus de cet endroit magique et calme ,songeurs et le coeur emplis d'espoir en l'avenir humain.Si cette communauté à travers tout ce qu'elle a subi a conservé et même peut-être renforcé sa conscience de notre identité morale et spirituelle,c'est que rien n'est impossible aux hommes même au coeur de notre décadence. 

Quelques jours plus tard nous devions prendre l'avion a l'aéroport du Cap quand nous rencontrâmes une responsable de l'université de Fort Hare venue quelques jours auparavant proposer à Ernest,de venir faire des conférences.Elle se débrouilla pour changer ses places pour être assise à coté de nous dans l'appareil.A peine avians nous décollé qu'elle nous apprend la raison de son voyage à Johannesbourg.Le décès et les funerailles d'un amide sa famille.Thomas Masekela.Or il se trouve que cet ·homme était aussi un ami d'Ernest et qu'il l'avait justement connu à l' Université de Fort Hare . Thomas quipouvait à peine marcher,était d'ailleurs venu seul en taxi africain,quelques mois auparavant voir l'exposition et son ami,Ernest. Cela avait été un moment de grande émotion.Et voici qu'on nous apprenait en plein ciel sa mort.Quel choc! Et ka coincidence que ce fut justement par une personne de Fort Hare que nous l'apprenions renforcait notre trouble. Le soir même à notre guest-house nous recûmes un coup de télephone.C'était la jeune femme,qui,avec des larmes dans la voix,car elle avait été une amie depuis l’enfance de la famille Masekela, qui nous apprend que le fils de Thomas,Hugh ,un célèbre trompettiste de jazz,tient absolument à la présence d'Ernest au concert  qu'il donne le même soir dans une boite de nuit de la ville,le Kippies.Nous voilà donc,malgre les fatigues du voyage en route pour"down-town Jo'burg".Au Kippies,une place nous est réservée à la table de la famille.Nous avons alors la révélation que ce fils de Thomas, est véritablement un génie du Jazz, car bien que nous ayions eu un echo de sa renommée,nous n'avions pas idée qu'il est véritalblement , l'égal des plus grands américains,avec une originalité africaine,profonde et authentique.Après le concert,le voici qui s'avance vers Ernest qu'il n'avait jamais vu mais dont il connaissait les liens avec son père et ouvrant les bras l’accueille du nom de"Père!".  J’appris par là qu’en Afrique ,en l'absence du père biologique tout adulte de la tribu est le père de l'enfant.Chose étrange et contradictoire avec la conception de la paternité des sociétés historiques,qui a son origine dans le fondement social de ces dernières,la propriétè privée et l'héritage,surtout sa transmission. Dans la société primitive,l'idée de paternité dépasse le concept de Sang. On a l'impression que les sociétés historiques cornme la notre ont rétréci la paternité.C'est ce qui fait que Jésus est révolutionnaire dans la société juive et romaine antique lorsqu'il dit sur la croix "Jean voici ta mère,femme voici ton fils!" Il ya bien un lien profond unissant par delà les différences d'epoques le Christ et l'homme primitif quand Jésus par exemple une formule étrange se définit comme le fils de l'homme,lui "Fils de Dieu".

Quelques jour plus tard comme nous roulions vers Sharpville où habitait Thomas et où devait avoir lieu ses funerailles,et que nous étions perdu dans la campagne du Transvaal ne trouvant pas la route de cette ville Elza qui nous conduisait danssa petite voiture,s'arrêta pour demander le chemin à un groupe de femmes au bord du carrefour.Il se trouva que l'une d'elles nous dit devoir aller aussi à ses funerailles Nous lui proposâmes de monter avec nous et de nous y conduire.Depuis la route sur la ligne d'horizon,voici qu'elle nous montre quelquechose que nous apercevons à peine: le cortège funèbre.Lorsque nous arrivons,il s'avére que la dame n'allait pas du tout a l'enterrement mais elle disparut vers la ville.Pourtant si elle n'avait pas été là nous serions arrivé en retard et n'aurions pu être témoin de ce qui allait suivre.Nous nous approchames.Après des chants repris par tous d'une beauté et d'une profondeur incroyables,le corps est mis en terre.Alors Hugh Masekela s'avance avec sa trompette. Jamais je n'oublierai sa silhouette, tandis qu’il joue façon déchirante;elle se detache sur un ciel trouble où roulent de gros nuages mais qui s'éclaircit à l'horizon,vers lequel s'étend le no-man's-land d'un cimetierre africain, aux tombes éparses et incertaines. 

Au retour à travers la campagne du Transvaal ,ou l'on apercevaient les propriétés immenses et les fermes des blancs,où surgissaient soudains de gigantesques complexes industriels,comme je n'en ai vu l'equivalent ou de plus grands qu'en de rares endroits  d'Europe, la Rhur et ou pour des kilomètres nous traversions des cités ouvrières noires comme Sebokeng,qu'une grande misère ne reussissait pas comme cela aurait été le cas en Europe è rendre amères,je songeais à l'étrangeté du Destin à la fois doux,en ce qu'il nous avait conduit,avec Ernest sur les chemins de notre patrie,enfin pacifiée,mais aussi implaccable,en ce qu'il coute de souffrances et de morts injustes. 

Quelques jours plus tard,à la suite d'une proposition faite lors d'un diner;au lendemain duquel Ernest prit la parole devant les jeunes étudiants des écoles d'arts de Johannesburg et de Soweto nous eumes droit à une incroyable émotion .Voir l'enthousiasme de la jeunesse aux paroles d'Ernest.Cela nous a montré combien est grand le besoin et la soif du du dialogue spirituel;et nous a donné un grand espoir pour l'avenir du destin culturel de la nation"arc-en-ciel"en train de naitre sous nos yeux. 

Le lendemain nous prenions l'avions du retour pour Paris ,la tête pleine d'idées nouvelles ,le coeur empli d'espérance,et  les yeux délavés par les flots d'amour qui avaient deferlés vers nous et vers Sonja au cours de ces mois enchantés,ou s'entremêlaient de façon,pour nous,incompréhensible,un réél bien tangible et le symbolique d'un inflexible destinée qui nous échappe quant au sens. 

Cher Gael;chere Iris,pardonnez nous encore notre si long silence.Cher Tobie je pense beaucoup à toi. J'espère que nous nous revérrons bientôt.Bien que notre amitié soit au delà de la présence celle ci nous est nécessaire pour se nourrir de la chaleur du contact et de la flamme au fond du regard que les mots sont à jamais impuissants à rendre. En attendant recevez l'expression de toute notre amitié et de nos pensées les plus vraies

vos frères [signed E. Mancoba]

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